Industrie pharmaceutique : comment répondre aux défis liés à la santé en Afrique ?

Le marché pharmaceutique africain est l’un des marchés qui connaît la croissance la plus rapide au monde et devrait atteindre 52 à 60 milliards de dollars d’ici 2020. La production locale représente un potentiel énorme pour stimuler la croissance économique et industrielle sur le continent, tout en apportant une réponse locale, sûre et durable aux besoins sanitaires de l’Afrique.

La croissance de l’industrie pharmaceutique en Afrique était au cœur de la Conférence Africa Pharma, organisée les 4 et 5 juin à Johannesburg par l’AUDA-NEPAD. Cette rencontre a souligné l’énorme potentiel du marché, avec les avantages qui en découlent pour le développement économique et la sécurité pharmaceutique du continent. A cet égard, la conférence a formulé une série de recommandations claires à l’intention des dirigeants du continent qui sont nécessaires pour que l’industrie locale exploite pleinement son énorme potentiel. Les marchés africains ne sont pas destinés à rester la proie des trafiquants de médicaments périmés ou un terrain concurrentiel pour les entreprises étrangères. La baisse des dons internationaux et des récents chocs d’offre montrent pourquoi il est temps que l’Afrique prenne son destin en main.

Une forte volonté politique a déjà permis à l’Afrique du Nord de montrer l’exemple. Le Maroc, l’Algérie, la Tunisie et l’Égypte couvrent 60% de leurs besoins en médicaments essentiels et exportent désormais les médicaments qu’ils produisent, y compris vers les marchés hautement réglementés de l’Ouest. L’Afrique du Sud a également ouvert la voie en développant sa production locale de médicaments génériques bon marché en créant à Aspen, l’un des dix premiers fabricants mondiaux de génériques.

Le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Nigeria, la Tanzanie… Tous ces pays développent des capacités de production locale, le Nigeria par exemple a plus de cent cinquante fabricants locaux. Sur 55 pays, l’Afrique compte 37 pays dotés d’industries pharmaceutiques nationales. Il convient également de noter les efforts déployés par les États pour mettre en place des systèmes d’assurance maladie. Du Bénin à la Tunisie, en passant par Djibouti, la Côte d’Ivoire, l’Éthiopie ou encore le Rwanda sont en train d’améliorer l’accès aux médicaments.

Bien que l’Afrique ne représente que 16 % de la population mondiale, il reste cependant beaucoup à faire sur le continent qui supporte 25 % du fardeau mondial des maladies. Le paludisme représente à lui seul un énorme défi de santé publique. C’est la maladie la plus mortelle en Afrique, devant la tuberculose et le VIH/SIDA. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Afrique subsaharienne représente 90% des 212 millions de cas de paludisme enregistrés en 2015 et 92% des décès causés par cette pandémie à la même année.

« l’Afrique de demain ne dépendra pas des donateurs pour ses besoins en médicaments, mais de ses propres ressources internes »

Comme le dit Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement (BAD) : « Le paludisme coûte à l’Afrique 12 milliards de dollars par an, soit 5 ou 6 % du PIB ». Entre 70% et 80% des médicaments consommés en Afrique sont importés, notamment d’Inde et de Chine. D’où la nécessité d’investir dans les industries locales pour approvisionner un marché en pleine croissance, sous l’impulsion du boom démographique et des progrès économiques importants – l’Afrique de demain ne dépendra pas des donateurs pour ses besoins en médicaments, mais de ses propres ressources internes. Par conséquent, elle devrait également être prête à s’approvisionner auprès d’entreprises basées en Afrique pour créer un cercle vertueux de développement économique et de santé.

Les partenariats, notamment avec l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et ONUSIDA, sont essentiels. Même si le partenaire le plus important, en fin de compte, n’est autre que le citoyen africain qui n’a pas accès aux médicaments. Il est nécessaire de restaurer sa confiance dans les produits locaux, et pas seulement importés, qui ne sont pas seulement accessibles, mais dont la qualité est assurée de manière adéquate par les autorités réglementaires.

C’est pourquoi l’AUDA-NEPAD a publié une « loi type » sur la réglementation des produits médicaux pour inspirer les États qui n’ont pas ou ne souhaitent pas compléter leur législation pharmaceutique nationale. L’objectif est d’établir une autorité réglementaire nationale, qui pourra travailler en tandem avec l’Agence africaine des médicaments (AMA), qui sera bientôt créée, lancée en 2018 pour harmoniser les réglementations existantes et améliorer l’accès aux produits sûrs.

Le Plan de fabrication pharmaceutique pour l’Afrique (PMPA), mené depuis 2007 par l’Union africaine et ses partenaires dont l’ONUDI, ONUSIDA et l’OMS, vise également à harmoniser les politiques nationales. C’est ce que les pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) se sont engagés en 2013 à créer un marché unique des médicaments. Une avancée concrète vers l’intégration sous-régionale, qui mérite d’être saluée. Le temps est donc venu pour l’Afrique de prendre son destin en main !

 

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