Se donner une chance pour réussir la ZLECAf

L’AUDA-NEPAD et Frederick S. Pardee Center for International Futures (Université de Denver) ont publié conjointement une étude sur les conditions de réussite dans la mise en œuvre de l’Accord de libre-échange continentale africaine. En voici les principaux enseignements.

Depuis la création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), entérinée lors du sommet de l’Union Africaine à Niamey, le 7 juillet 2019, nous n’avons de cesse de faire avancer l’idée qu’un marché commun pour et par les Africains est possible pour ainsi créer un marché unique des biens et des services afin de faciliter la libre circulation des personnes et des investissements, et jeter les bases d’une union douanière continentale. Nous continuons à promouvoir auprès des chefs de gouvernement cette intégration économique, privilégiant le partage des bénéfices économiques aux rivalités historiques et aux gains relatifs.

Cette étude s’inscrit dans cette démarche. Elle permet de mettre à plat l’ensemble des défis locaux et internationaux susceptibles d’accroître ou d’entraver la mise en œuvre de l’Accord. Elle éclaire ainsi les décideurs africains en mettant à leur disposition des données chiffrées objectives pour les aiguiller dans leur prise de décision. Car la condition préalable à la mise en œuvre de la ZLECAf reste la volonté politique de faire progresser les relations commerciales intracontinentales. Il s’agira alors pour les parties prenantes de coordonner et d’harmoniser les politiques commerciales aux niveaux national, régional, continental et mondial.

Repenser les sources de recettes publiques
La ZLECAf appelle à la suppression de 90 % des droits de douane sur le commerce intra-africain ce qui, pour certains pays tributaires de ces taxes, pourrait représenter une baisse des recettes publique et donc un obstacle à la réussite de l’Accord. Or, selon les données tirées de l’étude, les tarifs douaniers intra-africains sont faibles par rapport aux tarifs entre l’Afrique et le reste du monde. Environ 1,5 % du PIB africain soit 37 milliards de dollars provient des droits de douane sur les importations en provenance du reste du monde. Par comparaison, les recettes tarifaires du commerce intra-africain ne représentent que 0,1 % du PIB africain en 2015 soit 3,5 milliards de dollars. Aussi, la mise en œuvre de la ZLECAf aura un effet négatif limité sur les recettes publiques au niveau du continent.

« Les conditions du succès de la ZLECAf passent aussi par la réduction des obstacles non tarifaires au commerce, comme la mauvaise gouvernance, le manque d’infrastructure et les passages de frontières, et la prévalence du commerce informel. »

Faire monter en compétences et soutenir les États les plus fragiles
Au-delà des droits de douane, c’est l’ensemble du système d’imposition qu’il faudra harmoniser, notamment la TVA. Nombre de pays sont en incapacité de gérer ces nouvelles normes. Une formation rigoureuse des fonctionnaires de l’union douanière et le renforcement des capacités de chaque État membre sont indispensables. Pour les États les moins avancés, une aide plus directe sous forme de sessions de formation, d’aide économique et de développement institutionnel guidé devra être fournie par la ZLECAf et les organisations partenaires (Assemblée de l’Union africaine, douzième session extraordinaire, 2019). L’étude insiste sur le fait que la réussite du contrôle de la TVA dépendra de la réduction des niveaux de corruption associés aux impôts sur les recettes parmi les élites gouvernementales.

S’attaquer aux obstacles non tarifaires
Les conditions du succès de la ZLECAf passent aussi par la réduction des obstacles non tarifaires au commerce, comme la mauvaise gouvernance, le manque d’infrastructure et les passages de frontières, et la prévalence du commerce informel ; par la diversification des exportations pour le commerce intra-africain, notamment par l’augmentation de la production manufacturière locale ; par le renforcement de la surveillance des flux transfrontaliers de biens et de services.

Réduire les coûts consécutifs à la ZLECAf
Pour atténuer les tensions dans le cadre de la ZLECAf, l’étude préconise de créer un mécanisme de règlement des différends pour résoudre les questions qui se posent entre les États membres. Elle propose également de réfléchir à un Fonds de développement de l’Union africaine qui pourrait soutenir les pays qui connaissent des bouleversements sociaux en raison d’une plus grande ouverture commerciale en investissant dans le capital humain, les infrastructures et l’amélioration de la gouvernance.

Ainsi, la levée de tous ces obstacles au commerce, la bonne gouvernance et le développement des infrastructures, y compris les technologies de l’information et de la communication, sont des conditions incontournables de réussite de la ZLECAF. Dans cette optique, l’AUDA-NEPAD s’assurera que toutes les ressources soient mobilisées pour que les États signataires puissent de faire de cet immense projet, une réelle opportunité de croissance pour tous les Africains.

Pour consulter le rapport

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